Impacts des barrages sur les populations d’hippopotames et gestion du conflit avec l’homme : le cas du barrage de Kandadji sur le fleuve Niger

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Publication date
2015Author(s)
Kedl, Georges
Abstract
Le Programme Kandadji de Régénération des Écosystèmes et de Mise en Valeur du Fleuve Niger et son barrage engendreront des modifications de l'habitat de l'hippopotame commun (Hippopotamus amphibius) et pourraient donc amplifier le conflit avec les populations humaines locales. Comme l'impact des barrages n'a jamais été étudié en profondeur sur les populations d'hippopotames, cet essai évalue cet impact en général et identifie des méthodes de gestion de conflit homme-hippopotame appropriées au contexte de l'Afrique subsaharienne afin d'appliquer ces connaissances au cas de Kandadji. La création d'un réservoir ne bonifie pas nécessairement l'habitat de l'hippopotame, car celui-ci privilégie les milieux dynamiques et diversifiés, ainsi que les eaux peu profondes. De plus, son alimentation, constituée principalement de Graminées et de Cypéracées, dépend du cycle naturel de l'eau qui se caractérise par des crues et des sécheresses importantes dans son aire de répartition. La gestion du conflit homme-hippopotame représente un défi, car l'animal peut-être meurtrier et dévastateur, surtout lorsqu'il pille les cultures dont dépendent les communautés humaines d'Afrique subsaharienne pour leur survie. Plusieurs méthodes existent pour gérer ce conflit: la réduction à la source, par exemple en construisant des barrières physiques, ou l'augmentation de la tolérance à l'égard des dommages par la création de revenus, notamment à partir de l'écotourisme. La création d'un réservoir et la régularisation du débit d'un cours d'eau auront pour effet d'amplifier, du moins temporairement, le conflit potentiel. En effet, lors du remplissage, les pâturages naturels en amont du barrage seront détruits. Toutefois, à long terme, des pâturages adéquats pourraient recouvrir la zone de marnage du réservoir. En aval, la régularisation du cours d'eau réduira la surface des plaines inondables, diminuant ainsi son aire d'alimentation. Néanmoins, cette régularisation assurera un niveau d'eau suffisant pour s'y réfugier. Les populations d'hippopotames du Niger, tout particulièrement celle d'Ayorou, pourraient donc souffrir du remplissage du réservoir tandis qu'il est difficile de préciser si l'impact sera positif ou négatif pour les populations en aval du barrage. Aucune mesure de gestion du conflit homme-hippopotame proposée par le Plan de Gestion Environnementale et Sociale du barrage de Kandadji ne permettra de compenser la destruction des habitats à court terme. À long terme, les aménagements envisagés ne suffiront pas à remplacer l'ensemble des milieux détruits, et le mécanisme de compensation prévu pour soutenir les populations locales victimes du conflit homme-hippopotame est peu ambitieux, donc peu prometteur. Estimer la capacité de soutien du milieu avant et après la construction d'un barrage permettrait d'évaluer plus précisément l'impact sur les hippopotames. Des stratégies de gestion du conflit doivent être établies en collaboration avec les populations locales après analyse de la problématique locale, de l'écologie de l'hippopotame et des méthodes de gestion de conflit accessibles. Enfin, le succès des méthodes envisagées doit être suivi, puis les résultats divulgués, afin de créer une littérature scientifique extensive sur la gestion du conflit entre l'homme et l'hippopotame.
Collection
- Sciences – Essais [106]