L’importance des amphibiens pour la conservation des petits fragments forestiers dans les forêts tropicales humides
Publication date
2008Author(s)
Bourgeois, Pierre-Alexandre
Abstract
À l'insu de bien des gens, une extinction massive est en cours, celle des amphibiens de notre monde. Plus que tout autre groupe de vertébrés, les grenouilles, crapauds, et autres salamandres vivent des moments difficiles avec presque le tiers de leurs espèces étant désignées menacées d'extinction. Et plus les recherches se poursuivent plus la tendance va en empirant. Depuis quelques décennies déjà, on note toujours de nouveaux cas de populations ou d'espèces en déclin d'effectifs sinon disparaissant de leurs milieux naturels. Devant ces constats, je me suis demandé quelles menaces précises pesaient sur les populations d'amphibiens, quelles mesures étaient entreprises pour renverser la vapeur, quels sont les endroits sur Terre où les habitats sont si dégradés que leur conservation est urgente, et surtout comment les amphibiens peuvent aider à la promotion de leur conservation et de celle inextricable de la biodiversité régionale. D'abord, les amphibiens se voient exposés à diverses menaces affectant directement ou indirectement leurs populations et ce, sur tous les continents. La plus importante parmi celles-ci s'avère sans contredit la perte et la fragmentation d'habitats. Toutefois, plusieurs autres facteurs atténuants affectent, bien souvent en synergie, les amphibiens. Les effets nuancés des changements climatiques, l'incompris mais ravageur champignon Batrachochytrium dendrobatidis, les contaminants chimiques, les radiations UV-B, la collecte démesurée d'individus sauvages, et les espèces exotiques compétitrices et prédatrices participent tous à menacer davantage les espèces d'amphibiens. Par ailleurs, le système le plus courant et le plus efficace à ce jour pour tenter de freiner ces périls semble être celui d'aires protégées, et ce particulièrement dans les zones les plus diversifiées et dégradées, notamment dans les forêts tropicales humides. Les amphibiens, mise à part l'aide provenant de la formation et la gestion d'aires protégées, commencent à recevoir plus d'attention de la part des médias et surtout de consortiums internationaux tels que l'ASG et l'Aark. Récemment, d'utiles bases de données, comme le GAA, ont vu le jour et ont permis une meilleure compréhension et une circulation des informations sur les populations d'amphibiens. Cependant, compte tenu des menaces toujours accentuées qui les affligent, davantage d'initiatives devraient être allouées à la conservation des amphibiens. Établir des cibles prioritaires pour la conservation de la biodiversité semble essentiel afin de concentrer les ressources distribuées aux aires protégées. Les fameux points chauds de biodiversité représentent des régions fort pertinentes afin de remplir ce rôle. Plus précisément, les points chauds tropicaux possédant un couvert forestier très réduit et fragmenté constituent sans aucun doute des régions prioritaires pour la conservation, et même parfois pour la sauvegarde, de la biodiversité. Ainsi, la forêt Atlantique, Madagascar et les îles de l'océan Indien, les îles Caraïbes, les forêts guinéennes de l'Afrique de l'Ouest et les Philippines font partie des régions où la forêt tropicale humide est très menacée par les activités humaines. Les espèces parapluie, notamment les grands vertébrés, peuvent efficacement protéger de grands territoires variés en habitats. Toutefois, les petits fragments isolés ne sont pas toujours couverts par ces espèces, et ce même si leur valeur est importante pour la conservation de la biodiversité régionale. Or, les amphibiens, grâce, entre autres, à leur fidélité à un site et à leur unique et grande diversité inter- et intraspécifique, peuvent promouvoir la protection des petits fragments forestiers. Cette protection s'accomplit d'ailleurs par la création de corridors de biodiversité dans lesquels des fragments de toutes superficies sont bordés de zones tampons pour limiter les effets de bordure et faciliter la dispersion des êtres vivants. Toutefois, il est crucial de collecter des connaissances plus exhaustives sur les fragments et les zones encore inconnues des scientifiques mais primordiaux pour l'achèvement des objectifs de conservation de la biodiversité. De plus, des informations plus approfondies sur les populations d'amphibiens sont nécessaires pour définir davantage leur rôle de soutien dans cette démarche de conservation des régions tropicales les plus dégradées de la planète. Bref, cet essai propose la nécessité d'accorder plus d'attention aux amphibiens par l'entremise de la promotion de la conservation des petits fragments forestiers, Ainsi, les amphibiens s'avèrent d'importants candidats pour aider à la conservation de la biodiversité, du moins au niveau local et régional.
Collection
- Sciences – Essais [105]