Synthèse de nanocornes de carbone par plasma inductif

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Publication date
2022Author(s)
Casteignau, Fanny
Subject
CarboneAbstract
Mises en évidences dans les années 90s successivement par le Pr. Harris et le Pr. Iijima, les nanocornes de carbone (en anglais, carbon nanohorns, CNHs) sont des nanostructures de carbone graphénique de forme conique et creuse dont la pointe est fermée par une demi-sphère de type fullerène. Ces « nanocornes » mesurent environ 50 nm en longueur et ont un diamètre allant de 2 nm au niveau de la pointe à 5 nm à la base plus large. Ces nanostructures s’agencent toujours en agrégats indissociables d’une centaine de nanomètres de diamètre, dont la structure s’apparente à un oursin. Outre leurs nombreuses propriétés physiques et chimiques proches des nanotubes de carbone, la présence d’une cavité vide permet l’encapsulation de différentes molécules organiques telles que des colorants. L’internalisation de colorants dans une nanostructure vide, telle qu’une corne ou un tube, améliore nettement la réponse Raman des molécules organiques, un phénomène lié à un confinement dans la structure carbonée et à un étanchement de la fluorescence. C’est dans le cadre du développement et de l’amélioration de nanosondes Raman visant l’augmentation de la sensibilité de la détection d’allergènes dans l’industrie agroalimentaire que s’inscrit ce projet de doctorat. Les travaux présentés portent principalement sur l’étude et l’optimisation d’une nouvelle voie de synthèse de CNHs. Ce travail se divise en trois principaux chapitres décrivant l’étude des paramètres principaux de la synthèse par torche plasma radiofréquence (RF), la compréhension de l’impact du promoteur sur le plasma et la nanostructure obtenue, ainsi que la compréhension du mécanisme de nucléation et de croissance des nanocornes.
La première partie met en lumière une nouvelle voie de synthèse des CNHs. Ces nanostructures sont à ce jour produites par décharge d’un arc électrique, par ablation laser CO2, ou bien par chauffage direct par effet Joule. Dans ce chapitre, nous montrons que la production de CNHs par une torche plasma RF est une nouvelle alternative très intéressante comparativement aux méthodes actuelles et qu’il est possible avec l’ajout d’hydrogène de produire des nanostructures coniques fermées. Les synthèses par torche plasma RF offrent de nombreux avantages pour ces synthèses, tels que la versatilité de la nature des précurseurs (gazeux, liquides, solides) ainsi que la production de nanopoudres en continu et en très grande quantité (de g/h à kg/j). De plus, contrairement aux autres alternatives, notamment les torches DC et les techniques susmentionnées, cette technologie est sans électrodes et permet de synthétiser des nanopoudres de grande pureté dans un environnement inerte. Le réacteur est sous-divisé en trois parties (réacteur principal, réacteur auxiliaire et les filtres) et surmonté d’une torche plasma radiofréquence opérée avec une puissance de 15 kW et une fréquence d’excitation de 3 MHz. Dans la torche, un gaz plasmagène (argon) est dans un premier temps injecté afin de créer une flamme plasma et sont ensuite injectés les gaz réactifs (méthane et un gaz promoteur tel que l’hydrogène) pour être ionisés dans un tube en céramique placé au centre d’une bobine d'induction hélicoïdale. Les parois du réacteur sont refroidies par circulation d’eau, ce qui permet de figer et d’agréger les nanostructures par effet de thermophorèse. La pression et les débits des gaz précurseurs ainsi que leurs ratios sont des paramètres déterminants la ou les nanostructures récoltées. L’analyse thermogravimétrique est couramment utilisée pour analyser et quantifier les différentes structures de carbone. Dans cette thèse où certains échantillons présentent plus de 2 ou 3 nanostructures différentes, nous démontrons que cette technique de quantification ne permet pas de faire une analyse assez fine. Pour pallier cette lacune d’informations, nous avons réalisé une distribution qualitative des différentes structures en analysant de nombreuses micrographies obtenues par microscopie électronique en transmission à faible grandissement.
Des conditions opératoires très précises ont été déterminées pour permettre la synthèse de CNHs de manière quasi-sélective et avec un taux de production de ~15-20 g/h. Les expériences ont permis d’observer que la pression est un paramètre très important sur la croissance des nanostructures : une basse pression (<53 kPa) produit préférentiellement des feuillets de graphène et une pression plus grande (au-dessus de 67 kPa) favorise la production de CNHs. Un ratio H2:CH4 de 1:2 et une pression de 82.7 kPa permettent d’affiner encore plus la sélectivité de la structure obtenue. La co-production de nanocapsules graphitiques (GNCs) n’est toutefois pas dissociable de la production des nanocornes. La diminution du débit global a pour effet d’améliorer la sélectivité des CNHs, et de façon contre-intuitive, le taux de production de la nanopoudre.
Finalement, l’internalisation d’un colorant dans les CNHs produites par plasma RF montre une meilleure réponse Raman avant et après traitement au Piranha, ce qui indique une protection des molécules organiques face à un traitement acide très agressif. Cet élément est très important pour les futures applications des sondes Raman. Les molécules organiques sont stables et bien protégées dans les nanocornes produites par plasma RF, malgré leur taille plus petite que celles produites par d’autres méthodes citées plus haut.
Dans la seconde partie de la thèse, nous cherchons à comprendre l’impact de l’hydrogène sur la production et la sélectivité des CNHs en changeant la nature de ce promoteur. Pour cela, le méthane est injecté simultanément avec de l’azote, de l’argon ou de l’hélium. La flamme plasma est caractérisée par spectroscopie d’émission optique afin d’analyser la température et la densité relative d’espèces C2. Ce diagnostic in situ et les caractérisations par microscopie électronique en transmission démontrent que la production de nanocapsules graphitiques est anti-corrélée à celle des CNHs. Ces dernières sont également largement affectées par la nature du promoteur et la production de CNHs se fait au détriment des GNCs suivant l’ordre: He≥N_2>Ar>H_2. Cet ordre s’est également révélé dans l’évolution de la morphologie des nanocornes, avec des CNHs très bien définies lors de l’emploi d’hélium ou d’azote. Celle-ci s’altère toutefois avec de l’hydrogène en passant par de l’argon jusqu’à devenir des agrégats plus petits composés des nanocornes moins bien définies.
La spectroscopie d’émission optique permet de mettre en évidence l’impact du promoteur sur la température et la densité de C2 au sein de la flamme plasma dans la zone d’intérêt. Cette étude montre que la nucléation et la croissance des CNHs sont favorisées par l’ajout d’hélium ou d’azote avec des faibles débits comparativement au gaz plasmagène (argon) utilisé seul, induisant de hautes températures (3500 - 3700 K) et une forte densité de C2 en sortie de torche dans la zone de nucléation. Dans cette partie nous mettons en avant le rôle du promoteur dans la production de CNHs par plasma RF. Son apport permet de moduler les conditions de la flamme plasma et favorise la nucléation et la croissance de nanocornes au détriment des autres nanostructures dans la zone de réaction. En outre, ce dernier ne joue pas un rôle de catalyseur ou bien de réactif, car nous ne trouvons pas de traces d’azote dans les structures contrairement à ce qui est prouvé jusqu’à présent. L’ajout d’azote ou d’hélium à la place de l’hydrogène augmente la longueur des nanocornes, le taux de production (~20 g/h) et la sélectivité (~90 %).
À ce jour, le mécanisme de croissance des nanocornes demeure encore pratiquement inexploré, quoique certaines études ont évoqué une croissance à partir de la pointe ou par un enroulement de feuillets de graphène. Dans ce dernier chapitre, la microscopie électronique haute résolution (HRTEM) et corrigée en aberration sphérique est utilisée afin d’étudier les nanostructures à l’échelle atomique. Cette technique de caractérisation couplée aux simulations atomistiques et d’imageries TEM met en évidence la complexité des CNHs. L’étude des structures à différents grandissements met en lumière une plausible coexistence entre des structures graphitiques telles que les onion-like et les CNHs. Lorsque l’agrégat est suffisamment petit pour être transparent au faisceau électronique, nous observons que les agrégats de nanocornes montrent en leur centre une structure concentrique dont le diamètre n’excède pas 10 nm, comme celle des petites capsules. La dernière couche de ces petites capsules ne se referme pas et croît de façon à former une structure allongée et conique similaire aux nanocornes. À partir de ces mesures, nous proposons donc que la nucléation des CNHs démarre par la base de la nanocorne, suivant la dernière couche graphitique de la structure de type oignon. Ajoutée aux observations précédentes, la co-production de fullerènes est observée en même temps que la croissance des nanocornes. L’encapsulation occasionnelle des structures de type fullerène dans les nanocornes pendant leur croissance est démontrée et appuyée par des simulations d’images TEM. Les arguments présentés sont des éléments importants dans la compréhension des mécanismes de formation des CNHs.
Dans le cadre de ces travaux de thèse, nous montrons également la possibilité d’utiliser ces nanostructures comme capsules pour la création de sondes pour spectroscopie Raman complétée avec les premières images obtenues par microscopie HRTEM. En résumé, les résultats présentés mettent en avant la production des CNHs par plasma RF en co-injectant du méthane et de l’azote ou de l’hélium. De plus, les CNHs ont pu être étudiées par microscopie révélant une structure interne encore jamais identifiée. Ces observations nous ont également permis de proposer de nouvelles hypothèses quant au mécanisme de nucléation et de croissance des CNHs. Abstract: Carbon nanohorns (CNHs) are a hollow conical carbon nanostructures that are closed on
one side by fullerene hemisphere. They were identified for the first time in the 1990s by
Pr. Harris and Pr. Iijima. Horns generally measure about 50 nm in length and have a diameter
ranging from 2 nm at the tip to 5 nm at the wider base. An aggregate of horns forms an
indissociable cluster of about 100 nm in diameter which resembles the structure of a sea urchin.
In addition to similar physical and chemical properties to carbon nanotubes, the presence of an
empty cavity allows the encapsulation of various organic molecules such as dyes. The
internalization of dyes in an empty nanostructure, such as a horn or a tube, significantly
improves the Raman response of organic molecules. This phenomenon is due to the confinement
of the organic molecule inside the carbon structure which is responsible for quenching the
fluorescence. At a bigger scale, this project takes part in increasing the sensitivity of allergen
detection in food industry using Raman nanoprobes. The present study focuses on the
development and the optimization of a new synthesis pathway of CNHs that can be used as a
cap for Raman probes. This work is divided into three main chapters describing the study of the
main parameters of the RF plasma torch synthesis, the understanding of the impact of the
promotor on the plasma plume and the obtained nanostructure and finally the understanding of
the nucleation and growth mechanism of carbon nanohorns.
The first part highlights a new pathway for the synthesis of carbon nanohorns. Currently,
there are three main methods to produce CNHs: (i) by CO2 laser ablation method, (ii) by arcdischarge
and (iii) by Joules Heating. Contrary to carbon nanotubes (CNTs), all these syntheses
of CNHs do not require any catalyst. In this chapter, we show that the production of CNHs by
a RF plasma torch is a novel and interesting alternative to the current methods. Furthermore,
with our method the production of CNHs is possible by adding hydrogen. The RF plasma torch
syntheses offer many advantages such as the versatility of the nature of the precursors (gaseous,
liquid, solid), a continuous process and a high production yield (from g/h to kg/d). Furthermore,
unlike the other methods and the DC plasma torches, RF plasma torches are electrodeless
allowing high purity nanopowders syntheses in an inert environment. The reactor is subdivided
into three parts (main reactor, auxiliary reactor and filters) and topped by a radio frequency
plasma torch operated with a power of 15 kW and an excitation frequency of 3 MHz. A plasma gas (argon) is first injected inside the torch to create a plasma flame and then the reactive gases
(methane and a promoter gas such as hydrogen) are added to be ionized in a ceramic tube placed
in the center of a helical induction coil. The reactor walls are water-cooled, which allows to
quench and aggregate the nanostructures by thermophoresis effect. The pressure and the global
flow rates of the precursor as well as their ratios are the most significant parameters on the
nanostructured formed. Generally, thermogravimetric analysis is commonly used to analyze and
quantify the different carbon structures. In this thesis, where some samples present more than 2
or 3 different nanostructures, we demonstrate that this technique is not relevant for a quantitative
analysis. To overcome this lack of information, we have performed a qualitative distribution of
the different structures by analyzing many micrographs obtained by transmission electron
microscopy at low magnification.
Carbon nanohorns are produced selectively and at an attractive production rate (15-20 g/h)
following precise operating conditions. The experiments showed that pressure is a very
important parameter on the growth of nanostructures: a low pressure (<53 kPa) favors the
production of graphene sheets, and a higher pressure (above 67 kPa) produces CNHs. A H2:CH4
ratio of 1:2 and a pressure of 82.7 further refines the selectivity of the obtained structure.
However, the co-production of graphitic nanocapsules (GNCs) cannot be dissociated from the
production of CNHs. The yield and the selectivity of CNHs increase with the decrease of global
flow rate.
Finally, the internalization of a dye into the RF plasma-produced CNHs shows a better
Raman response before and after Piranha treatment, indicating that the cap protects the organic
molecules against a very aggressive acid treatment. This is very important for future applications
of Raman probes. The organic molecules are stable and well protected in the RF plasmaproduced
nanohorns, despite their smaller size than those produced by other methods mentioned
above.
In the second part of the thesis, we seek to understand the impact of hydrogen on the
production and selectivity of CNHs by changing the nature of this promoter. For this, methane
is injected simultaneously with nitrogen, argon or helium. The plasma jet is characterized by
optical emission spectroscopy in order to analyze the temperature and the relative density of C2.
In-situ diagnostic and transmission electron microscopy characterizations demonstrate that the production of graphitic nanocapsules is anti-correlated to those of CNHs and is also affected by
the nature of the promotor. The production of CNHs is at the expense of CNGs following the
order: He≥N2>Ar>H2. This order was also revealed in the evolution of the morphology of the
nanohorns. CNHs are very well defined when using helium or nitrogen as promotor gas whereas
the use of hydrogen or argon as promotor alter the morphology and aggregates become smaller
with less well-defined horns.
Optical emission spectroscopy shows the impact of the promotor on the temperature and
density of C2 within the plasma jet inside the nucleation zone. This study shows that the
nucleation and growth of carbon nanohorns are favored by the addition of helium or nitrogen
with low flow rates compared to the plasmagen gas (argon) used alone, inducing high
temperatures (3500 - 3700 K) and a high density of C2 at the exit of the torch in the nucleation
zone. In this chapter, we highlight the role of the promotor in the production of CNHs by RFICP.
Its contribution allows to modulate the conditions of the plasma flame and favors the
nucleation and the growth of nanohorns to the detriment of the other nanostructures in the
reaction zone. Moreover, the latter does not play a role of catalyst or reagent, because we do not
find traces of nitrogen in the structures contrary to what has been proven so far. The addition of
nitrogen or helium instead of hydrogen increases the length of the nanohorns, the production
rate (~20 g/h) and the selectivity (~90%).
To date, the growth mechanism of the nanohorns remains unexplored, although some
studies have suggested growth from the tip or by closing a graphene sheet. In this last chapter,
high resolution and spherical aberration corrected electron microscopy (HRTEM) is used to
study the nanostructures at the atomic scale. This characterization technique coupled to
atomistic simulations and TEM imaging highlights the complexity of CNHs aggregates. The
study of the structures at different magnifications highlights a plausible coexistence between
graphitic structures such as onion-like and CNHs. When the aggregate is small enough to be
transparent to the electron beam, we observe that the CNHs aggregates show in their center a
concentric structure whose diameter does not exceed 10 nm, just like those in small capsules.
The last layer of these small capsules does not close and grows to form an elongated and conical
structure similar to a nanohorn. These measurements therefore propose that the nucleation of
CNHs starts from the base of the nanohorn, following the last graphitic layer of the onion-like structure. Added to the previous observations, the co-production of fullerenes is observed at the
same time as the growth of nanohorns. The encapsulation of fullerene-like structures inside
some horns during their growth is demonstrated and supported by TEM image simulations. The
arguments presented are relevant elements for the understanding for the growth mechanisms of
CNHs.
In the framework of this thesis, we also show the possibility of using these nanostructures
as capsules for the creation of probes for Raman spectroscopy complemented by first images
obtained by HRTEM microscopy. In summary, the results highlight the production of carbon
nanohorns by co-injecting methane and nitrogen or helium by RF-ICP. Moreover, horns
aggregates observed by microscopy reveal an internal structure never identified before. These
observations also allowed us to propose new hypotheses about the nucleation and growth
mechanisms of carbon nanohorns.
Collection
- Moissonnage BAC [4253]
- Génie – Thèses [955]