Le recours aux pratiques coercitives auprès des élèves présentant des difficultés comportementales : une description des attributions causales de futures personnes enseignantes au préscolaire et au primaire

Abstract

La composition des classes ordinaires est de plus en plus hétérogène et nécessite que la personne enseignante adopte des pratiques qui fournissent un enseignement répondant aux besoins de tous. Ce défi serait d’autant plus grand pour les élèves qui présentent des besoins au regard de l’adaptation psychosociale, notamment concernant la gestion des comportements extériorisés en classe. Malgré l’avancement des connaissances et les efforts mis à soutenir la mise en place de pratiques recommandées dans les milieux scolaires en vue de soutenir les comportements prosociaux des élèves, des pratiques coercitives (retrait, expulsion, etc.) sont encore utilisées afin de restreindre ou supprimer les comportements extériorisés des élèves (opposition, impulsivité, hyperactivité, etc.). Ces pratiques sont pourtant associées à un cycle de coercition ayant des effets négatifs pour l’élève, le climat d’apprentissage et les pairs, ainsi que pour la personne enseignante elle-même. Pour comprendre leur utilisation, une recension des écrits a permis de mettre en lumière que les attributions causales des acteurs scolaires et la formation initiale à l’enseignement seraient à considérer. Par conséquent, la présente recherche vise à décrire les attributions causales de futures personnes enseignantes au préscolaire et au primaire à l’égard des pratiques coercitives afin de gérer les difficultés comportementales. Se basant sur la théorie des attributions causales de Weiner (1986), les objectifs spécifiques sont : 1) identifier les attributions intrapersonnelles de futures personnes enseignantes envers le recours aux pratiques coercitives et 2) identifier les attributions interpersonnelles de futures personnes enseignantes envers les comportements extériorisés des élèves. La présente recherche emprunte un devis descriptif qualitatif. L’échantillon composé de 30 personnes participantes de 3e et 4e année provenant de trois universités au Québec a permis de conduire un total de 19 entretiens individuels semi-dirigés et trois groupes de discussion. La méthode d’analyse de contenu selon les étapes proposées par Fortin et Gagnon (2016) est utilisée pour répondre aux objectifs de recherche. Ainsi, prenant appui sur le discours des personnes participantes et leur analyse, les résultats suggèrent que des caractéristiques propres à la future personne enseignante, comme le manque d’expériences et de connaissances ainsi que le manque d’autorégulation pourraient expliquer le recours aux pratiques coercitives pour gérer les comportements extériorisés des élèves. Selon analyse du discours des personnes participantes à partir de la théorie des attributions causales, les résultats révèlent également que des caractéristiques provenant de l’environnement pourraient expliquer le recours à ces pratiques, telles que des facteurs scolaires (le nombre d’élèves dans une classe, le contexte de suppléance, les choix de l’équipe-école et les politiques de l’école) ou propres à l’élève (biologiques ou psychologiques, ou provenant de l’environnement de l’élève tels que la famille et la classe). La présente étude permet ainsi, à la lumière de la théorie des attributions causales de Weiner (1986), de contribuer à l’avancement des connaissances, notamment quant au recours aux pratiques coercitives de futures personnes enseignantes au préscolaire et au primaire. D’abord, en considérant la voix de futures personnes enseignantes, leurs besoins de préparation concernant la gestion de comportement sont mieux identifiés et risquent d’être mieux cerner par la formation initiale. Par conséquent, elle sera plus susceptible de répondre aux besoins de préparation des futures personnes enseignantes concernant la gestion des comportements, faisant en sorte qu’elles aient moins recours aux pratiques coercitives, ce qui, pourrait favoriser l’engagement des personnes enseignantes dans la profession et la persévérance scolaire des élèves.