L'attachement et le fonctionnement sexuel chez les couples en démarche de fertilité : le rôle des stratégies d'adaptation propres à l'infertilité
Publication date
2022Author(s)
Boudreau, Gabrielle
Subject
InfertilitéAbstract
L’infertilité, soit l’incapacité de concevoir un enfant ou de mener à terme une grossesse après douze mois de rapports sexuels réguliers et non protégés (Organisation mondiale de la santé, 2018), est une problématique d’envergure mondiale. Au Canada, près de 16 % des couples sont concernés (Gouvernement du Canada, 2019). Les traitements de fertilité sont liés à des difficultés non négligeables sur les plans psychologique, conjugal et sexuel (voir Coëffin-Driol & Giami, 2004; Péloquin & Lafontaine, 2010; Piva, Lo Monte, Graziano, & Marci, 2014; Ying, Wu, & Loke, 2015, pour des revues). La majorité des études se limite à l’expérience de la femme seulement (Péloquin & Lafontaine, 2010) et a examiné les impacts psychologiques de l’infertilité, peu d’études s’étant penchées sur la sexualité dans ce contexte (El Amiri et al., 2021; Purcell-Lévesque, Brassard, Carranza-Mamane, & Péloquin, 2019). Or, compte tenu du fait que l’infertilité affecte le fonctionnement sexuel du couple dans son tout (Piva et al., 2014), la sexualité ne peut être considérée individuellement. La présente étude utilise la théorie de l’attachement pour mieux comprendre comment les insécurités d’attachement peuvent expliquer les différences dans le fonctionnement sexuel, incluant la fonction et la satisfaction, des couples en démarche de fertilité. Puisque plusieurs chercheurs notent l’importance d’explorer les mécanismes explicatifs des liens entre les insécurités d’attachement et la sexualité (p. ex., Butzer & Campbell, 2008; Dewitte, 2012), la contribution de quatre stratégies d’adaptation propres à l’infertilité est examinée dans les associations entre les insécurités d’attachement et le fonctionnement sexuel chez 97 couples de sexes mixtes en traitement de fertilité. Il s’agit du blâme personnel (c.-à-d., le fait de se blâmer pour le problème de fertilité), du déni (p. ex., prétendre que la situation n’arrive pas, ou refuser d’y croire), la recherche de soutien du partenaire (p. ex., demander à son partenaire de s’impliquer dans les traitements de fertilité) et l’auto-négligence (c.-à-d., le désinvestissement de sphères auparavant importantes et l’adoption d’habitudes de vie peu saines). Les partenaires ont complété des questionnaires mesurant l’attachement, soit l’anxiété d’abandon (c.-à-d., la peur d’être rejeté ou abandonné par son partenaire, reposant sur une perception négative de soi comme ayant peu de valeur) et l’évitement de l’intimité (c.-à-d., l’inconfort avec l’intimité émotionnelle et la peur de dépendre d’autrui, reposant sur une vision négative de l’autre comme peu digne de confiance); les stratégies d’adaptation propres à l’infertilité et le fonctionnement sexuel. Les résultats révèlent des associations entre l’anxiété d’abandon et une plus faible satisfaction sexuelle via l’utilisation de l’auto-négligence, entre l’anxiété d’abandon et la satisfaction sexuelle du partenaire via le blâme personnel et entre l’anxiété d’abandon et la plus faible fonction sexuelle via l’auto-négligence et le déni. L’évitement de l’intimité a été lié à moins de recherche de soutien auprès du partenaire et à une plus faible satisfaction sexuelle. L’étude souligne la pertinence des stratégies d’adaptation propres à l’infertilité pour comprendre la présence de difficultés sur le plan du fonctionnement sexuel chez les couples en démarche de fertilité.