Étude de l'association entre l'utilisation de benzodiazépines et l'apparition de démence

Abstract

Introduction : La prévalence de la démence au sein de la population mondiale est en constante évolution, et aucun traitement curatif n’existe à ce jour. L’un des seuls moyens de protection reste la prévention de cette maladie, passant par l’identification de facteurs potentiellement modifiables. Les benzodiazépines (BZD) sont prescrites contre les troubles anxieux et les troubles de l’alternance veille-sommeil. L’un de leurs effets indésirables est l’amnésie antérograde. Certaines études observationnelles ont noté une éventuelle association entre l’exposition à des benzodiazépines et l’augmentation du risque de développer une démence. Toutefois, ces écrits souffrent d’un biais de causalité inverse relié à la phase prodromique précédant le diagnostic. Objectifs : L’objectif principal de cette étude est d’étudier l’association entre les BZD et l’apparition de démence. Les objectifs secondaires visent à brosser un portrait d’utilisation des BZD dans notre échantillon, d’examiner la relation entre les caractéristiques pharmacocinétiques des BZD et l’augmentation du risque de développer une démence, et enfin d’explorer l’influence de la phase prodromique sur cette association. Méthodologie : Cette étude cas-témoin (n=5 344) est une analyse de données secondaires issue de la cohorte enrichie TorSaDE, elle-même obtenue par le jumelage des données de l’Enquête sur la Santé dans les Collectivités Canadiennes (ESCC), et des banques de données médico-administratives de la Régie de l’assurance maladie du Québec (RAMQ). Les cas étaient des participants âgés de plus de 50 ans avec un diagnostic de démence. Les témoins étaient appariés (1:4) sur des caractéristiques sociodémographiques. Les variables d’utilisation, de demi-vie d’élimination et de durée d’exposition aux BZD ont été analysées dans des régressions logistiques conditionnelles multivariées afin de déterminer le risque de démence en lumière de la littérature recensée. Ensuite, une étude annuelle (1 à 10 ans en amont du diagnostic) a permis d’analyser le poids de la phase prodromique dans nos analyses principales. Résultats : L’exposition aux benzodiazépines est significativement associée au risque de développer une démence (OR (IC 95%) = 1,65 (1,42-1,93), p=0,0009), résultat retrouvé quel que soit la caractéristique des BZD analysée, et la durée du prodrome appliquée (1 à 10 ans avant le diagnostic). Conclusion : Les benzodiazépines sont associées au risque de développer une démence, et des études prospectives pour établir s’il y a un lien de causalité sont nécessaires. Une modification des habitudes de prescription des BZD est jugée souhaitable.