Contraintes de crédit et performances des micro, petites et moyennes entreprises dans le milieu manquant de l’offre de financement : trois évaluations empiriques

Abstract

Dans les pays en développement, les micro, petites et moyennes entreprises (MPME) ayant jusqu’à 250 employés sont des acteurs importants de la croissance économique tant par leur nombre (162 millions) que par leur capacité de création d’emplois (2/3 de la main d’œuvre à temps plein). Toutefois, l’émergence d’un secteur privé dynamique y est freinée par les contraintes d’accès au crédit. Les banques commerciales ciblent essentiellement les grandes entreprises situées dans les centres urbains. Le microcrédit étant lui centré sur les petites activités génératrices de revenus, nous constatons l’existence d’un milieu manquant dans l’offre de financement. Celui-ci concerne toutes les MPME dont les besoins excèdent les capacités du microcrédit tout en ne suscitant pas l’intérêt des banques commerciales. Pourtant ces MPME possèdent un potentiel avéré puisqu’elles ont réussi à élever leur activité au-delà du simple seuil de subsistance. Dans cette thèse, nous nous proposons donc d’évaluer les effets de l’accès au crédit sur les performances des MPME coincées dans ce milieu manquant. Grâce à des données collectées sur la clientèle d’un nouveau type d’institution financière au Panama et en Ouganda, nous développons trois approches d’analyse empirique : (i) un modèle en double-différence établit un parallèle avec la littérature existante, (ii) une approche quasi-expérimentale avec la Regression Discontinuity Design examine les effets selon le statut d’éligibilité pour un prêt et (iii) une analyse par variables instrumentales traite des questions d’endogénéité et d’auto-sélection sur le marché du crédit. Nos résultats montrent que l’accès au crédit a un effet certain sur le niveau d’investissement des entreprises. L’impact sur le chiffre d’affaires est non seulement plus modéré mais également plus sensible aux spécifications. Enfin, l’impact sur l’emploi demeure quasi-inexistant à l’exception du modèle en double différence qui prédit un accroissement significatif des salaires au Panama. Les effets bénéfiques sont renforcés pour les petites entreprises de 5 salariés et plus alors que les autoentreprises sont négativement impactées. Cette hétérogénéité des effets est le reflet des coûts du crédit qui, en raison des montants élevés étudiés ici, s’avèrent assez pesant pour les entreprises de taille modeste. Nous en concluons donc que les effets de l’accès au crédit pourraient être renforcés, notamment par des politiques de réduction des taux d’intérêt et un meilleur ciblage de la clientèle.