Les différences de contre-transfert chez des psychothérapeutes en formation selon les dimensions de narcissisme rencontrées en psychothérapie

Abstract

Les personnes souffrant d’un narcissisme pathologique sont reconnues pour être difficiles à traiter en psychothérapie. La difficulté pour les psychothérapeutes à gérer l’intensité de leur contre-transfert est un des facteurs complexifiant le processus psychothérapeutique avec ces clients. Depuis quelques années, la documentation scientifique mentionne l’existence de plusieurs dimensions de narcissisme pathologique. Parmi celles-ci, les dimensions de narcissisme grandiose, fragile et fonctionnel exhibitionniste sont fréquemment citées. Bien que ces dimensions aient fait l’objet de plusieurs études, très peu ont porté sur les différences de contre-transfert qu’elles peuvent induire en psychothérapie. Malgré leurs caractéristiques communes, il est possible que ces différentes expressions du narcissisme pathologique entrainent des réactions contre-transférentielles différentes chez les psychothérapeutes au fil des séances. Le contre-transfert étant un outil psychothérapeutique important, l’objectif général de cette étude est de mettre en lumière certains prototypes de contre-transfert selon différentes dimensions du narcissisme, dans le but de mieux cerner et diagnostiquer cette problématique et de mieux orienter les interventions en psychothérapie. De manière plus précise, cette étude vise dans un premier temps à dresser un portrait des différentes réactions contre-transférentielles chez des psychothérapeutes en formation selon les trois dimensions du narcissisme pathologique susmentionnées. Deuxièmement, elle a comme objectif d’observer l’évolution du contre-transfert au fil des séances, et si possible, de le mettre en relation avec les différentes dimensions du narcissisme. L’échantillon est constitué de 42 clients effectuant un suivi psychothérapeutique au Centre d’intervention psychologique de l’Université de Sherbrooke (CIPUS) et de 14 étudiants au doctorat en psychologie clinique de l’Université de Sherbrooke. Les dimensions du narcissisme sont évaluées à l’aide de trois instruments. Le contre-transfert des psychothérapeutes en formation est évalué à deux reprises lors du suivi psychothérapeutique. Des corrélations bivariées sont effectuées afin de dresser un portrait des associations entre le narcissisme grandiose, fragile et fonctionnel exhibitionniste et le contre-transfert des psychothérapeutes en formation ainsi que pour vérifier si la fréquence et la force des associations tendent à augmenter au fil des séances. Les résultats démontrent que les psychothérapeutes en formation ayant un client présentant un narcissisme grandiose ont tendance à ressentir un contre-transfert généralement moins positif. Ceux ayant un client présentant un narcissisme fragile ont tendance à se sentir désengagés. Les résultats démontrent de plus que la dimension du narcissisme fonctionnel exhibitionniste à tendance à induire un contre-transfert plus positif chez les psychothérapeutes en formation. La fréquence des associations entre le narcissisme et le contre-transfert a légèrement augmenté suite à la deuxième prise de mesure pour seulement un instrument. Outre l’apport aux connaissances sur le narcissisme pathologique, cette étude est une des premières qui s’intéresse empiriquement à l’aspect évolutionnel du contre-transfert en lien avec le narcissisme pathologique.