Traduire le roman historique de jeunesse Morven and the Horse Clan dans la perspective du néolithique : un recadrage des hiérarchies entre humains (masculin/féminin) et animaux (humain/animal)

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Publication date
2021Author(s)
Descôteaux, Valérie
Subject
JeunesseAbstract
Le roman historique Morven and the Horse Clan plonge ses lectrices et lecteurs dans l’époque éloignée du néolithique tout en mettant à l’avant-plan une héroïne qui adopte des valeurs posthumanistes où prédominent les discours féministes et animalistes propres au 21e siècle.
Je me suis d’abord intéressée à ce roman parce qu’il me donnait l’occasion de parler des chevaux au jeune lectorat francophone. Pas de façon superficielle, non, car ce roman met en scène une héroïne qui tente de parler le langage des chevaux, à partir de ce qu’ils sont. Traduire cette œuvre me permettait donc de montrer que l’humain peut entrer en relation avec ces animaux merveilleux s’il apprend à les connaître et à les traduire, comme le fait Morven/Meïka.
Or, grâce à des chercheurs et chercheuses comme Michael Cronin et Corinne Pelluchon, j’ai compris que cette œuvre de jeunesse allait bien au-delà d’une simple histoire de jeune fille apprivoisant des chevaux. Cette dernière pouvait susciter une réflexion profonde chez nos lecteurs et lectrices, en ce qui avait trait notamment aux rôles sociaux des sexes et à la relation entre les humains et les animaux. De plus, comme le roman historique permet de faire réfléchir son lecteur ou sa lectrice à sa société, j’ai vu la traduction de ce roman comme une occasion de sensibiliser le jeune lectorat du 21e siècle à la question des relations entre les animaux et les humains, cruciale en cette époque. J’ai donc, comme Pelluchon l’exhortait, fait de ma traduction un espace où le message posthumaniste (de Luanne Armstrong) serait entendu dans son intégralité : l’humain ne serait plus en position de domination face à l’animal, car il tiendrait désormais compte de ses besoins. C’est pourquoi j’ai puisé dans mon expérience personnelle des chevaux pour traduire, avec le plus de sensibilité possible. J’ai été non moins attentive à la sémantique de ces corps chevalins en interaction particulière avec la narratrice-focalisatrice Morven/Meïka. Cette dernière devient leur interprète privilégiée, ce que la focalisation nous donne à voir dans le détail.
Outre l’aspect relationnel humain-animal, ce roman renfermait une critique sociale, portée par Morven/Meïka, qui affirmait envers et contre tous son droit de se libérer des conventions liées au sexe, que l’autrice présente comme déjà figées à cette époque. Comme je souhaitais traduire l’accent féministe du discours de l’héroïne, je me suis tournée vers de Lotbinière-Harwood, qui m’ouvrait les portes de la traduction comme d’une écriture à s’approprier en tant que traductrice. Cela m’a permis de traduire avec souplesse les passages où Morven/Meïka prend son essor identitaire.
C’est donc en combinant la réflexion d’auteurs et d’autrices des domaines de l’histoire, de la littérature, de la traduction, de la science du langage animal et de l’éthologie que j’ai pu traduire le plus justement possible les cinquante premières pages de l’œuvre de Luanne Armstrong. Sans compter ma propre expérience personnelle avec les chevaux, qui m’a démontré à quel point les chevaux sont des êtres sensibles et intelligents, et qu’ils méritent le plus grand respect de la part des humains, ce respect passant d’abord par la volonté de comprendre leur langage, afin de développer une relation éthique, basée sur la compréhension de leurs besoins. Mon projet de traduction d’une œuvre de fiction historique répond par conséquent à mon besoin de faire découvrir au jeune lectorat l’importance de comprendre le monde animal qui l’entoure pour une existence terrestre plus harmonieuse entre les espèces.
Collection
- Moissonnage BAC [4455]
- Lettres et sciences humaines – Mémoires [2411]