Impacts moléculaires directs de la voie des œstrogènes et du récepteur aux œstrogènes erα dans le tissu adipeux blanc viscéral de souris saines ou atteintes d’obésité

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Publication date
2019Author(s)
Morin, Martin
Subject
Récepteur aux œstrogènes α (ERα)Abstract
La reproduction est un processus biologique qui est énergiquement coûteux pour les organismes. Une bonne communication avec le système impliquant le métabolisme énergétique doit être mis en place pour s’assurer que la reproduction se déroule correctement jusqu’à son terme. Ainsi, des hormones endocriniennes produites par le tissu adipeux interagissent aussi bien au niveau central que périphérique de manière endocrine, paracrine et autocrine afin de permettre le contrôle des tissus impliqués dans le métabolisme énergétique, ainsi que ceux impliqués dans la reproduction. Ces peptides bioactifs sécrétés par le tissu adipeux sont nommés adipokines. La leptine en particulier est en partie régulée par des voies dépendantes de l’œstradiol (E2). Plus intéressant, des souris portant une mutation inactivant le gène de la leptine (souris ob/ob) sont infertiles. L’administration exogène de leptine recombinante stimule le système reproducteur endocrinien et restaure la fertilité. De plus, des mutations dans le gène du récepteur de la leptine provoquent une résistance à la leptine se concluant par des dysfonctions reproductives.
Chez les mammifères, les hormones sexuelles, dont les œstrogènes particulièrement, stimulent, maintiennent et contrôlent la distribution des graisses dans l’organisme et le métabolisme du tissu adipeux blanc (WAT). Les œstrogènes régulent la masse graisseuse en stimulant la lipolyse par la modulation de l’expression des gènes affectant ainsi le dépôt, la différenciation et le métabolisme des adipocytes. Chez la souris, la perturbation de la synthèse des œstrogènes par ovariectomie ou par délétion du gène Cyp19a1 codant pour l’aromatase entraîne une redistribution significative du stockage des lipides et une augmentation de la masse graisseuse totale. Réciproquement, dans ces modèles de souris, un traitement aux œstrogènes restaure le métabolisme normal des lipides. De plus, la masse adipeuse chez la femme augmente lors du déclin en œstrogènes survenant à la ménopause, ce qui représente un autre exemple physiologique clair de l’effet anti-adipogénique des œstrogènes.
Les relations des voies de signalisation de l’E2 avec les tissus impliqués dans la reproduction et le métabolisme des graisses a un intérêt majeur dans la compréhension des interactions qui existent entre ces deux fonctions. Aujourd’hui, les mécanismes moléculaires connectant la reproduction, les voies de signalisation E2/ERα (récepteur aux œstrogènes ERα) et le métabolisme des lipides chez les mammifères sont connus, mais les mécanismes moléculaires sous-jacents sont encore flous.
Dans un premier temps, nous avons déterminé le rôle moléculaire de ERα dans l’établissement d’une réponse transcriptionnelle spécifique au tissu adipeux. Nous avons exploré cette question par localisation de ERα au niveau de la chromatine et par identification des gènes dont l’expression est dynamiquement régulée par l’E2. Nous avons alors déterminé que la voie E2/ERα induit une activation du métabolisme des adipocytes par une oxydation privilégiée des lipides par rapport au glucose, ce qui est concordant avec ce qui peut être observé chez la femme ménopausée subissant un traitement aux œstrogènes. Nous avons de plus conclu que la dépense énergétique était accrue dans les adipocytes traités à l’E2 grâce à l’augmentation de l’activité du cycle de Krebs et à un découplage de la chaine de transport des électrons.
Dans un second temps, nous nous sommes concentrés sur le rôle de ERα dans un cas physiopathologique : l’obésité. En effet, l’obésité est associée avec des changements épigénétiques majeurs dans les adipocytes, tels que la méthylation de l’ADN au niveau des doublets CpG (cytosine-guanine). Nous avons de plus observé une perte de réponse à l’E2 des gènes cibles de ERα identifiés précédemment, et une perte du recrutement de ERα à ses sites de liaison dans les adipocytes. Nous avons ensuite relié ces résultats avec une fermeture de la chromatine et une perte des marques d’activation au niveau de ces sites de liaison. Ensemble, ces résultats nous ont permis de conclure que le WAT développe une résistance aux œstrogènes associée au développement de l’obésité.
Ce projet de recherche a ainsi permis de poser des bases moléculaires aux rôles physiologiques de l’E2 et de ERα sur l’expression des gènes dans les tissus impliqués dans le métabolisme énergétique. Nous avons ensuite observé qu’une situation physiopathologique comme l’obésité est associée avec une résistance aux effets des œstrogènes. Dans l’ensemble, les résultats de ces projets de recherche ont permis d’identifier des cibles importantes des œstrogènes et de ERα pouvant potentiellement être utilisées pour traiter des pathologies comme l’obésité.
Collection
- Moissonnage BAC [4453]
- Sciences – Thèses [789]