Le champ des contraintes et son évolution sous des conditions de chargement unidimensionnel dans les dépôts d'argile structurée de l'est du Canada

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Date de publication
1984Auteur(s)
Philibert, Alain
Sujet(s)
Mécanique des solsRésumé
Le champ des contraintes sur le terrain et la manière dont il se développe lors de la construction d'un ouvrage a depuis longtemps préoccupé le géotechnicien. Nous savons que le comportement mécanique des argiles est relié à l'état structural du squelette argileux lequel est dépendant de l'état de contrainte qui le sollicite. L'introduction à cette thèse pose d'ailleurs toute la problématique du comportement des argiles en considérant le sol tour à tour dans un état surconsolidé et normalement consolidé. Le chapitre 1 fait état en quelque sorte de l'avancement de nos connaissances sur le champ des contraintes in situ et d'une façon plus globale sur le rapport des contraintes Ko. Diverses approches ont ainsi été explorées tant sur le terrain qu'en laboratoire pour pouvoir l'évaluer correctement. Cependant les difficultés sont nombreuses et on accuse souvent le remaniement du sol d'être responsable des écarts entre la prédiction et la mesure. Transposée en laboratoire, l'étude du rapport des contraintes se heurte à des difficultés de reproduire l'état de déformation latérale nulle qu'implique l'expression même de ce rapport. Les essais de fracturation hydraulique comme moyen pour mesurer les contraintes latérales ont été privilégiés principalement parce qu'ils impliquent un sol "non remanié" et que les techniques d'interprétation sont bien connues. D'autre part, en laboratoire, l'essai oedométrique semble représenter celui le plus apte à reproduire la compression unidimensionnelle telle qu'on la rencontre sous l'axe d'un remblai: la méthodologie de l'essai est connue, reproductible et de comparaison facile avec les essais conventionnels. Ainsi peut-on introduire les deux grands volets de notre recherche, à savoir, l'évaluation du rapport des contraintes in situ, l'évaluation du rapport des contraintes en laboratoire et son développement avec l'accroissement des charges verticales. Sur le terrain, (chapitre 2), le champ des contraintes a été investigué à partir d'essais de fracturation hydraulique. L'échantillonnage du sol autour du piézomètre a permis de constater que le mode de fissuration du sol n'était pas unique mais qu'il pouvait se développer un réseau de fissures horizontales et/ou verticales suivant la longueur des pointes piézométriques. Le phénomène de l'expansion d'une cavité dans l'argile semble d'ailleurs indiquer que la longueur de la pointe piézométrique est déterminante si on considère la résistance en tension du sol, et qu'un réseau de fissuration vertical et unique est plus probable de se développer lorsque la longueur de pointe excède 300 mm. D'un autre côté, les rapports Ko évalués suivant l'approche de BJERRUM et ANDERSEN (1972) peuvent donner des valeurs plus grandes que l'unité et qui augmentent de façon cohérente avec le degré de surconsolidation du sol. En considérant le mode de fissuration vertical du sol dans les dépôts surconsolidés étudiés, on constate que les contraintes latérales résiduelles issues de la période où le dépôt était normalement consolidé sont probablement celles qui conditionnent la fermeture des fissures et par le fait même, le rapport des contraintes in situ actuellement. En laboratoire (chapitre 3) le développement de deux (2) cellules oedométriques munies de capteurs de contrainte latérale et des pressions interstitielles a permis d'étudier l'évolution du rapport des contraintes durant la consolidation. On peut ainsi remarquer que les propriétés élastiques du sol dans le domaine surconsolidé commandent un rapport de contrainte très faible (Kooc = 0,16 - 0,18) jusqu'à l'effondrement de la structure à la pression de préconsolidation. Le taux d'accroissement de la contrainte latérale est alors plus rapide que l'accroissement de la contrainte verticale de sorte que la contrainte de cisaillement de l'argile diminue. Passé la pression de préconsolidation, le rapport des contraintes s'établit à la valeur normalement consolidée de 0,55 environ, valeur représentative du rapport des contraintes dans les sols argileux normalement consolidés. L'évolution des pressions interstitielles et des pressions latérales effectives dans le temps indique que le rapport des contraintes n'est pas stable dans le temps probablement dû aux effets de la relaxation. Par ailleurs, le chapitre 4, par l'élaboration d'un modèle de comportement, fait le lien entre les observations faites sur le terrain et en laboratoire. On indique que, si la recompression de l'argile à l'oedomètre peut être assimilée sur le plan du comportement mécanique à la phase décompression/recompression sur le terrain, les valeurs théoriques du rapport des contraintes K"o in situ, issues du modèle proposé, sont très près de celles obtenues sur le terrain par fracturation hydraulique, et ce, particulièrement lorsque les degrés de surconsolidation sont inférieurs à 3 environ. Le chapitre 5 est en quelque sorte un exemple d'application des observations faites au cours de notre recherche en les appliquant au cheminement des contraintes dans le sol lors de la construction d'un remblai. L'étude de la variation de la contrainte de cisaillement à l'oedomètre montre que le taux d'accroissement de cette contrainte avec la contrainte moyenne est fonction précisément du rapport des contraintes dans le domaine surconsolidé, et qu'une contrainte de cisaillement critique est atteinte lorsque le comportement contrainte/déformation cesse d'être linéaire. Subséquemment, la contrainte de cisaillement augmente légèrement puis demeure sensiblement constante avec l'accroissement de la contrainte moyenne. Elle forme alors un plateau qui s'étend jusqu'au voisinage de la contrainte moyenne issue du rapport des contraintes Konc. On observe par ailleurs pour certaines argiles aux indices des vides élevés, une diminution sensible de la contrainte de cisaillement passé la contrainte de préconsolidation, qui trouve son explication dans l'accroissement rapide des contraintes horizontales lors de l'effondrement de la structure. L'augmentation possible de la résistance de l'argile avec la structuration du squelette argileux dans le temps géologique peut également être un facteur propre à accentuer cette diminution de résistance si on se réfère seulement à l'état de contrainte qu'elle a connu antérieurement. Nous pouvons anticiper de cette diminution de contrainte des conséquences défavorables en regard de la stabilité des remblais. Dans un même ordre d'idée, si le sol à l'oedomètre est reconsolidé sous un champ de contrainte comparable à celui existant in situ avant échantillonnage, il s'ensuit que le "plateau" où se développe la contrainte de cisaillement est à toute fin pratique inexistant. Nous percevons ainsi l'importance de connaître le champ des contraintes in situ afin de pouvoir étudier correctement en laboratoire le cheminement des contraintes. L'histoire des contraintes dans les dépôts surconsolidés et le comportement mécanique de l'argile dans le domaine surconsolidé apparaissent donc les facteurs essentiels régissant l'évolution du rapport des contraintes durant la compression unidimensionnelle et la résistance structurale des argiles.
Collection
- Génie – Thèses [945]