dc.description.abstract | L’exploitation durable de la faune sauvage doit minimiser les impacts de la récolte sur l’écologie
et l’évolution des espèces exploitées et éviter d’affecter les populations dans les aires protégées.
La récolte sélective, surtout si elle est importante, peut induire des conséquences évolutives. Les
refuges, aires protégées où aucune chasse n’est permise, peuvent agir comme source d’individus
reproducteurs non sujets à cette sélection artificielle et tamponner les effets de la récolte
sélective si des individus originaires des aires protégées vont se reproduire dans les zones
chassées. Cependant, le rôle des refuges sur la rescousse phénotypique des espèces chassées
pour le trophée a rarement été évalué empiriquement.
Ce projet de maîtrise visait à évaluer les variations spatiales et temporelles dans les effets de la
proximité des refuges sur la taille des cornes, un trait lié au succès reproducteur des mâles, et
l’âge à la récolte dans les populations de mouflon d’Amérique (Ovis canadensis) chassées. Pour
ce faire, j’ai utilisé une base de données à long terme d’environ 6 000 béliers récoltés sur 39 ans
(1975-2013) en Alberta.
Les résultats montrent que la longueur des cornes, un trait ciblé par les chasseurs, et l’âge à la
récolte augmentaient avec la proportion de refuges à l’intérieur d’une zone tampon de 25 km de
rayon autour de chaque localisation de bélier tué. Toutefois, la circonférence à la base des cornes
n’était pas influencée par la proximité aux refuges. Le nombre de béliers récoltés augmentait
significativement durant les 10 derniers jours de la saison de chasse en octobre, correspondant
avec le début de la migration pour le rut. Ceux abattus pendant les 10 derniers jours de la saison
étaient en moyenne 17% plus près de la frontière d’un refuge que ceux récoltés plus tôt pendant
la saison de chasse. Nos résultats supportent l’hypothèse selon laquelle des mâles commencent
à migrer des aires protégées à la fin de la saison de chasse, soit avant le rut, vers les zones de
chasse et sont récoltés, éliminant ainsi leur contribution à une possible rescousse phénotypique des cornes. Cependant, de l’incertitude demeure quant à la proportion de mâles qui s’exilent des
refuges vers les zones chassées et qui survivent puisque les informations sur la migration prérut
sont manquantes. L’acquisition de données sur la quantité et la chronologie des mouvements
des mâles est donc essentielle pour déterminer l’efficacité des refuges à tamponner les effets de
la récolte sélective.
En conclusion, le scénario selon lequel les refuges agissent comme une source d'individus
permettant une rescousse phénotypique des populations de mouflons chassés en Alberta est peu
probable. Cela s’explique par le risque élevé des béliers d’être récoltés en sortant des refuges,
soit avant d’avoir eu l’occasion de se reproduire. Pour assurer une exploitation durable, réduire
de 10 jours la saison de chasse ou bien renforcer les réglementations de chasse en établissant
une réglementation morphologique plus stricte de longueur de cornes à plus de zones de chasse
en Alberta permettrait aux béliers de vivre plus longtemps et de se reproduire avant d’être
récoltés. | fr |