Le désert blanc de Jean Ethier-Blais : traduit par Élaine Cadotte

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Publication date
1991Author(s)
Cadotte, Élaine
Abstract
Ayant, pour l'obtention de la maîtrise ès arts en littérature canadienne comparée, le choix entre un mémoire de recherche et un mémoire de traduction, j'ai choisi ce dernier parce qu'il est plus en rapport avec mon orientation professionnelle de pigiste et sous-traitante en rédaction et traduction. Ma décision prise en faveur du mémoire de traduction, j'ai consulté dans le numéro courant de la revue Lettres Québécoises la rubrique "Livres reçus". Si j'ai retenu le recueil de nouvelles Le Désert Blanc de Jean Ethier-Blais, c'est d'abord en raison de la notoriété d'un écrivain qui occupe une place importante sur la scène des lettres québécoises depuis bientôt trente ans; et ensuite parce que je pensais pouvoir aborder le texte sans parti pris, puisque le recueil n'avait pas encore fait l'objet d'un compte-rendu critique. Car, je devais m'en rendre compte par la suite, Jean Ethier-Blais est un auteur à controverse. Cela tient moins à son œuvre imaginaire qu'aux idées, qu'à l'idéologie qui la sous-tendent, copieusement et constamment exprimées dans son oeuvre d'essayiste et de journaliste littéraires. L'idéologie en question, est parfaitement cohérente, d'ailleurs. Elle repose sur la conviction que la langue française et la littérature qui en découle ne peuvent être le fait que d'une élite, et que cette élite se définit par sa fidélité à la culture de la France. Cette conviction, avec sa méfiance à l'égard de tout populisme et du langage qui s'en inspire, ne pouvait manquer de heurter une génération d'écrivains québécois pour qui la France n'est plus la mère nourricière et ne devrait être, au mieux, qu'une parente lointaine et bienveillante. On dirait que les ressentiments et la polémique soulevés par les ideés de Jean Ethier-Blais n'ont fait que confirmer celui-ci dans sa volonté d'écrire selon sa conviction. Ce qui met la traductrice devant le problème si bien défini par MM Vinay et Darbelnet dans leur ouvrage Stylistique Comparée du français et de l'anglais (Montréal, 1958, p. 58), à savoir, le transfert du message du plan de l'entendement au plan du réel. Le style sobre et dépouillé de Le Désert Blanc illustre bien cette tendance vers l'abstraction de l'expression qu'il s'agit de concrétiser par un effort constant d'invention dans la traduction anglaise. Mais c'est grâce à cet effort que j'en suis venue à apprécier l'intégrité de l'auteur dans sa recherche d'une certaine perfection qui fasse honneur à la variante québécoise d'une culture française universelle. Souvent exaspérée par les difficultés purement techniques de la traduction, il m'aurait été trop facile d'en imputer la cause à ce conservatisme dépassé qu'on semble lui reprocher. La traduction terminée, cependant, j'ai l'impression d'avoir participé à l'oeuvre accomplie par Jean Ethier-Blais dans Le Désert Blanc.