Mécanismes du texte dans le roman de Boris Vian

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Publication date
1974Author(s)
Morcos, Lore
Abstract
Les romans littéraires de Boris Vian défient (à l'exception de Vercoquin et le Plancton) toute illusion référentielle, se constituent donc d'emblée en métaphore. L'accès au sens à l'aide de clefs symboliques prétendument universelles reste insatisfaisant du moment que la particularité du symbole dans un contexte donné n'est pas respectée, à défaut d'un relevé suffisamment exhaustif de ses occurrences et de ses affinités chez l'auteur en question. La consommation standard, "normale" des romans de Vian donne lieu à des commentaires du genre « …les romans les plus bouleversants, les plus cruels, les plus poétiques de l’après-guerre", à lire sur la pochette de l'Automne à Pékin ; et sur celle de l’Écume des jours, « Le plus poignant des romans d'amour contemporains », jugement de Raymond Queneau. Le contenu émotif prime et relègue des données à référence interne du texte, qui devraient troubler la vague de sympathie soulevée. Ainsi Angel, le héros de l'Automne à Pékin, reste-t-il une figure attachante, attendrissante en dépit du meurtre d'un ami et de la femme aimée; si la préméditation ne peut être affirmée, l'absence de regret est manifeste. Il y a là un effet rhétorique au sens classique, finaliste. Le lecteur sympathique ira jusqu'à récupérer, au moins dans certains romans, une idéologie pacifiste et un amour de l'humanité. Le présent travail voudrait être l'amorce d'une lecture critique du roman de Vian, qui part de sa textualité, de sa littéralité. Si la lecture "normale" passe sur les particularités de la forme en prenant pour acquis la transparence du langage dont tout au plus des effets stylistiques pourraient augmenter le charme littéraire, la lecture envisagée ici devra partir d'une investigation du langage tenu pour essentiellement opaque. L'histoire racontée dans cette zone opaque complétera l'histoire racontée explicitement, son intrigue et ses caractères.